Fig 2003

 

Compte-rendu de Thierry Dobbels

Le festival de géographie de Saint-Dié-des-Vosges s’est déroulé du 2 au 5 octobre 2003.

 

Cette année, il portait sur le thème de l’eau :

 

            « Eau et Géographie : l’eau, source de vie, source de conflits, trait d’union entre les hommes »

 

 

Certains comptes-rendus des tables rondes, conférences-débats et cafés géographiques sont sur le site du festival : http://fig-st-die.education.fr/actes.

 

 

Voici une sélection non exhaustive pour la mise en œuvre des programmes avec les grandes articulations :

 

 

- Jean-Claude BOYER : « Les Pays-Bas face à la menace des grands fleuves ».

http://fig-st-die.education.fr/actes/actes_2003/boyer/article.htm

 

                        > présentation du milieu naturel.

                        > le combat historique contre les inondations.

            > l’augmentation des moyens de protection à l’époque contemporaine et les projets actuels de renforcement des digues dans le cadre d’une politique globale d’aménagement du territoire.

            > les limites de tels projets.

 

 

- Stéphane DE TAPIA : « Le projet GAP en Turquie : aménagement du territoire, politique intérieure et géopolitique ».

http://fig-st-die.education.fr/actes/actes_2003/detapia/article.htm

 

                        > situation géographique et historique du projet (3 tableaux statistiques).

                        > les objectifs du projet.

                        > les conséquences économiques, sociales, écologiques, culturelles, politiques et géostratégiques du projet.

 

 

- Monique MAINGUET : « Les sécheresses et le génie créateur de l’homme dans les milieux secs : une nouvelles géographie de l’adaptation ».

http://fig-st-die.education.fr/actes/actes_2003/mainguet/article.htm

 

                        > typologie des sécheresses.

                        > les modes d’utilisation de l’espace élaborés par les sociétés pour répondre aux contraintes spécifiques des milieux secs.

                        > l’adaptation, paramètre clé de la Géographie, science de carrefour, ouverte, « plastique » : le cas des ruraux des milieux secs qui ont acquis une « culture d’adaptabilité ».

 

 

            - Jean MARGNAT : « Ressources en eau et utilisations dans le monde. Idées reçues et réalités ».

http://fig-st-die.education.fr/actes/actes_2003/margat/article.htm

 

> un rappel : ne pas confondre ressources en eau et masses d’eau de l’hydrosphère.

> les ressources en eau sont-elles « naturelles » ?

> est-ce l’eau ou l’Humanité qui est « mal répartie » sur la Terre ?

> les pays riches utilisent-ils plus d’eau que les pays pauvres ?

> quelle est la cause majeure des manques d’accès à l’eau potable dans le monde ?

 

 

            - Paul-Gabriel VIRAPIN-APOU : « Les maladies dues à l’eau dans les pays du Tiers-Monde ».

http://fig-st-die.education.fr/actes/actes_2003/virapin/article.htm

 

                        > le choléra.

                        > la maladie du ver de guinée ou dracunculose.

                        > le virus du Nil occidental.

                        > la bilharziose.

                        > l’onchocercose.

                        > le paludisme.

  

 

Deux actes reviennent sur la définition, la mise en oeuvre et les finalités de l’étude de cas en géographie :

 

- Jean-Jacques MISERY : « L’étude de cas en géographie ».

http://fig-st-die.education.fr/actes/actes_2003/misery/article.htm

 

 

- Louis-Pascal JACQUEMOND: « Vous avez dit « étude de cas » ? ».

http://fig-st-die.education.fr/actes/actes_2003/jacquemond/article.htm

 

 

A noter aussi le compte-rendu d’un café géographique de Martine TABEAUD « Météo : sale temps pour la pluie ! » qui rétablit, non sans humour, quelques vérités sur la pluie « espérée et désespérante ».

 

            Parmi les conférences, celle de Bernard BRET a retenu mon attention même si elle n’est pas (encore ?) dans les actes du FIG.

 

L’eau du sertao du Nordeste brésilien, un problème social et politique

v    Résumé.

 

Les crises périodiques dues aux sécheresses, les « secas », ont ravagé à plusieurs reprises la région semi-aride du Sertao dans le Nordeste brésilien.

Malgré plus d’un siècle de politiques d’irrigation mises en œuvre par l’Etat, elles n’ont toujours pas disparu.

Les grands éleveurs ont dévoyé les objectifs de ces projets pour imposer une « industrie de la sécheresse ».

 

v    Compte-tendu de la conférence de Monsieur Bernard BRET, géographe, professeur à l’Université de Paris VIII.

(vendredi 3 octobre 2003)

 

            Le Sertao brésilien donne l’image d’une région à problème. Le premier accident climatique de taille catastrophique intervient dans les années 1877-1879, il tua plus de 120 000 personnes (et presque tout le bétail).

q                   Bernard BRET s’interroge dans un premier temps sur la pertinence de l’appellation « Brésil semi-aride » pour cette région.

 

            Le gradient bioclimatique est très important du littoral vers l’intérieur, trois milieux se succèdent, « collés » aux précipitations en décroissance rapide.

Ø      la Mata (2 400 mm de pluie par an).

Ø      l’Agreste (1 000 > 600 mm de pluie par an).

Ø      le Sertao (moins de 600 mm de pluie par an).

 

La semi-aridité de cet espace se lit moins dans le total annuel des précipitations que dans leur inégale distribution :

 

> dans le temps : 1 200 mm de pluie en 1899 // 146 mm en 1900 !

 

> dans l’espace : des secteurs plus arrosés que d’autres, les « brejos », souvent en liaison avec des précipitations orographiques.

 

Un facteur aggravant est l’inadaptation des épisodes pluvieux par rapport au calendrier agricole : c’est le problème majeur des sécheresses, les « secas ».

q                  

Dans un deuxième temps, Bernard BRET met en évidence les enjeux politiques et économiques de ces sécheresses qui sont l’occasion d’un affrontement social.

 

            En effet, une sécheresse se traduit par une crise économique intense (ex. celle de 1998-1999 : les productions de haricots, de riz, de maïs baissent respectivement de 76%, 44%, 77%).

 

De plus, elle est sélective socialement :

 

                        . bien-sûr elle affecte beaucoup plus durement les pauvres que les riches.

 

            . elle est aussi différemment ressentie suivant l’activité économique principale et donc les structures foncières.

Les latifundistes vivant d’un élevage bovin extensif dans la « caatinga » sont moins affectés que les minifundistes propriétaires directs ou métayers, pauvres en terres, survivant de modestes productions vivrières ou commerciales, d’abord végétales.

 

            Une « seca » entraîne très vite un « épisode de faim » associé à une surmortalité, d’où une situation sociale explosive et des désordres publics.

 

            La crise est instrumentalisée par les groupes sociaux dominants et une véritable « industrie de la sécheresse » se met en place.

 

            En effet, dès la fin du XIXe siècle, les aides fédérales sont confisquées par les potentats locaux.

L’Etat finance la construction de barrages (plus de 600 dans le Sertao) et donne du travail aux paysans.

            Les travaux sont réalisés sur les terres des latifundistes et permettent quelques travaux d’irrigation.

 

            Après cette phase interventionniste, la structure sociale inégalitaire reprend ses droits et les latifundistes confisquent l’eau des petits barrages (les « açudes ») pour leur bêtes.

 

Dès 1919, la loi Pesoa a bien tenté de réparer cette injustice (menaces théoriques d’expropriation) mais elle n’a jamais été appliquée du fait d’une « connivence classique et tacite » entre l’Etat fédéral et les grands propriétaires qui assurent la paix sociale.

 

            Au total, cette « industrie de la sécheresse » voyait et voit toujours intervenir trois acteurs :

Ø      l’Etat qui finance les projets.

Ø      les sinistrés qui construisent les aménagements et n’en profitent pas.

Ø      les latifundistes qui organisent la pénurie et profitent de la situation.

 

 

q                   Pour conclure, Bernard BRET s’interroge sur les chances de cette région pour devenir un jour une « nouvelle Californie ».

 

Le tracé du « polygone des sécheresses » n’a cessé de s’agrandir depuis sa création par l’Etat fédéral en 1936.

Il couvre aujourd’hui plus de 900 000 km² où les périmètres irrigués prennent de l’ampleur : 112 000 ha en 1987, plus de 450 000 ha en 1997.

 

Une véritable politique hydraulique associée à une réforme agraire serait à définir alors que les latifundistes se tournent désormais vers l’irrigation et les fruits de contre-saison (melon, raisin, etc.).

Ils font travailler des ouvriers agricoles et d’anciens minifundistes qui ont tout perdu : ce sont les « boias-frias » (« gamelles froides » : ils emportent avec eux un casse-croûte à manger sur le lieu de travail) qui sont embauchés au jour le jour.

 

            La loi sur l’eau de 1997 organise le pays en agence de bassin, c’est la reconnaissance de la valeur économique de l’eau : les choses bougent mais des centaines de réservoirs sont encore gérés de manière laxiste : on est encore loin d’une gestion à l’américaine.

 

 

v    UTILISATION PEDAGOGIQUE POSSIBLE.

 

 

            Dans le cadre du programme de 2nde et du chapitre consacré à « l’eau entre abondance et rareté », il s’agit de montrer que les multiples aménagements engendrent des tensions entre différents usages et à différentes échelles.

 

            Dans le cadre du programme de terminale et du chapitre consacré à « agriculture et développement en Amérique latine », il s’agit de montrer les tensions créées par l’inégale répartition des terres.

 

 

Þ                Avec l’exemple du Sertao brésilien, on peut dégager les enjeux politiques, économiques et sociaux de la maîtrise de l’eau dans les régions semi-arides en évoquant cette idée que les sécheresses ou plutôt leurs effets peuvent être organisés, renforcés par les hommes (« l’industrie de la sécheresse ») pour satisfaire leurs projets.

v    BIBLIOGRAPHIE INDICATIVE POUR LE PROJET.

 

Bernard BRET et Hervé THERY, « Le Brésil : de la croissance au développement ? », la Documentation photographique, août 1996, n°7036.

 

Document d’appui : diapositive 9 et texte d’accompagnement page 8 de la pochette diapositives.